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L’avenir du journalisme
Une conférence de David Frum au Ryerson College

1. Situation actuelle

Les années 90 ont été remplies d’espoir pour les journalistes. De nouveaux emplois ont été créés grâce à Internet. Ces journalistes pensaient faire fortune en vendant les actions boursières données par leurs employeurs en compensation des maigres salaires que ceux-ci leur offraient.

Aujourd’hui, c’est la fin de la ruée vers l’or. Ces actions, qui permettaient de rêver à des retraites prématurées, ont perdu pratiquement toute leur valeur.

Un phénomène similaire s’est produit du côté des médias traditionnels. Le nombre de magazines américains a atteint un sommet dans les années 90. Les chaînes de télévision se sont multipliées. La publication de l’information s’est transportée sur Internet. En 1998, un nouveau quotidien national a même été créé au Canada.

Cette effervescence n’a pas duré mais, malgré la désillusion qui a suivi, David Frum croit que le journalisme a un avenir prometteur. Même si, souligne-t-il, tout indique le contraire.

Le marché de la publicité est à son plus bas depuis la fin des années 90. La valeur des actions des grands médias ne cesse de dégringoler. Des magazines, des sites Web et des canaux spécialisés de télévision ferment, entraînant des pertes d’emploi.

Des journalistes ont été tués en raison de leur profession. La liberté de presse est l’un des symboles de la démocratie que les terroristes veulent détruire : les attaques à l’anthrax ont visé plusieurs médias.

Quelques problèmes sont plus spécifiques au Canada. Les médias privés se sont développés en fonction de normes dictées par le gouvernement. Ces normes tombent en désuétude au fur et à mesure que la technologie se développe. Quel avenir attend les chaînes câblées maintenant que la télévision est disponible sur Internet? Que deviendront les télévisions publiques dans le contexte où les gouvernements devront répondre à d’autres priorités budgétaires, la santé notamment ?

Malgré tout, David Frum demeure optimiste. Il rappelle sa propre définition du journalisme : le fait que l’information et les opinions concernant les affaires publiques soient rendues disponibles à une audience de masse par des personnes qui essaient d’être justes et neutres.

Tant que les gens voudront être informés de ce qui se passe autour d’eux, qu’ils préfèreront une information juste à une rumeur, qu’ils souhaiteront entendre des personnes neutres rapporter un fait, le journalisme continuera d’exister.

Tant que le besoin d’être renseigné augmentera, les médias seront en bonne position. Or, il y a effectivement une croissance de la demande d’information.

Par ailleurs, le journalisme fait face à plusieurs paradoxes. Les magazines américains d’information se meurent. Times a perdu un tiers de ses lecteurs depuis quinze ans et il en perdra encore. Pendant ce temps, The Economist est fleurissant.

Les réseaux de télévision s’écroulent. Les émissions présentées par les chaînes traditionnelles en fin de soirée aux États-Unis ont perdu presque la moitié de leur auditoire en dix ans. Au même moment, le nombre d’émissions d’information est en hausse grâce aux canaux d’information continue.

Les quotidiens éprouvent des difficultés. Le lectorat est en baisse, tout comme le nombre de titres. La majorité des villes américaines ne comptent qu’un quotidien. Par ailleurs, les lecteurs de journaux ont sur Internet un accès instantané à pratiquement tous les journaux du monde, et ce, de façon gratuite ou à un prix dérisoire.

C’est la pire époque pour les médias, mais c’est aussi la meilleure, croit David Frum, car tous ces changements peuvent permettre tant aux producteurs qu’aux consommateurs d’information de repenser leur rôle.

2. Le consommateur

Il est content qu’on s’intéresse davantage à l’information du point de vue du consommateur. Car c’est pour lui que les journalistes font leur métier. Comment leur travail peut-il être utile pour la société si les médias ne rejoignent pas les gens? Or, pour les rejoindre, les médias d’information doivent rapporter ce qui les intéresse. C’est d’ailleurs l’un des échecs du journalisme canadien de ne pas avoir réussi à rassembler les gens de ce pays, parce qu’il n’a pas compris - ou n’a pas cherché à comprendre - toutes les composantes de son public, tant celui de l’est que celui de l’ouest.

Par ailleurs, du point de vue du consommateur, la multiplication des sources d’information représente tout un défi, surtout lorsqu’Internet devient une source de choix.

Car Internet est à la fois la meilleure et la pire source d’information. Vous pouvez y trouver le nom de toutes les victimes des attentats du 11 septembre 2001, mais vous pouvez aussi y trouver une information affirmant que les attaques de ce jour-là étaient organisées par le gouvernement américain pour justifier une hausse du budget alloué à la défense. Voilà pourquoi les internautes devront de plus en plus souvent utiliser leur jugement pour discerner ce qui est ce crédible et ce qui ne l’est pas.

En fait, Internet ramène un certain journalisme non professionnel. Il y a cent ans, le journalisme n’avait rien de professionnel. La plupart des journaux étaient la voix officielle des partis politiques. Il n’y avait pas de distinction entre les faits et les opinions.

Après la Deuxième Guerre Mondiale, le journalisme devint quelque chose de professionnel. On établit un code d’éthique. Le lien entre les journaux et les partis politiques fut rompu. L’objectivité devint la norme.

Aujourd’hui, Internet nous ramène en 1900, voire en 1750, à l’époque des pamphlétaires. N’importe qui peut créer son propre site et y diffuser de l’information et des opinions sans distinction. Ces sites, qu’on a baptisés « blog », comme AndrewSullivan.com et Instapundit, sont parfois très populaires. Il leur arrive même d’imposer certains sujets à l’actualité.

La bonne nouvelle, c’est que, malgré tout cela, il semble bien que, de façon générale, le public soit mieux informé que jamais.

Mais l’auditoire change et les médias doivent s’y adapter. Dans le monde d’aujourd’hui, le fait de consommer devient une manière de s’exprimer et de se définir. Les bons journalistes seront donc ceux qui ne transmettront pas uniquement des faits aux « consommateurs d’information », mais qui les aideront également à se définir à travers ces faits.

Cet auditoire en changement ne se contente plus de regarder et d’écouter. Par Internet et les blogs, il fait valoir son point de vue à propos de ce qu’il regarde et écoute. Il suggère des idées de reportage. Certains créent leur propre média pour faire valoir leurs opinions et réaliser leurs propres reportages.

Bref, du point de vue du consommateur, l’avenir du journalisme, c’est que tous ceux qui le voudront pourront ainsi devenir journalistes.

3. Le producteur

L’abondance d’information fait le bonheur du consommateur, mais le malheur des propriétaires de médias, pour qui cela signifie davantage de concurrence.

Les médias font face à un défi de taille : une station de télévision ne peut pas avoir autant de revenus dans un marché de cinq cents stations que dans un marché de treize stations. De même, un quotidien ne peut pas augmenter son prix de vente alors que son contenu est disponible gratuitement sur Internet.

Pour faire face à la situation, les médias forment des conglomérats de plus en plus gros. Pourtant, selon David Frum, aucune compagnie ne pourra jamais être assez importante pour s’assurer de ne pas faire faillite. « Construire de gros édifices sur des bases fissurées est très risqué », dit-il.

Pour les journalistes, le futur est facile à prévoir. Dans un monde où l’information abonde et où les journalistes sont nombreux, celui qui se démarquera ne fera pas que rapporter des faits, il réussira à traiter ce qu’il rapporte d’une manière personnelle et originale.

Le monde du journalisme est moins prévisible et plus mouvementé que jamais. Les bénéfices possibles augmentent en même temps que les risques à prendre. Cela devient une profession de moins en moins attirante pour ceux qui recherchent la sécurité et la tranquillité.




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